Le Grand Filtrage 1.1 : Quotient inintellectuel
PAR P30 · 15/12/2021
Le Grand Filtrage est une “théorie du complot” élaborée par moi-même, elle décrit un processus itératif d’exclusion progressive et contrôlée de pans de plus en plus larges de la population hors de l’économie mesurée. Le Grand Filtrage vise à exclure des circuits économiques certaines populations, alors que l’économie se contracte et se contractera, afin de maintenir les privilèges et les rentes d’élites et décideurs tout en camouflant la contraction économique auprès de leur base servile.
Payer plus pour…
… Pour apprendre moins. C’est en effet ce que révèle un article récent du Courrier des Stratèges : 110 milliards par an dans l’Education Nationale, une dépense énorme (premier secteur de dépense de l’état français) qui vaut 5,2% du PIB, supérieure aux autres pays de l’OCDE. Et les performances de nos chers petits sont en deçà de la moyenne de l’OCDE. 40% des élèves sortant du primaire ont des acquis en lecture et mathématiques insuffisants pour assurer leur scolarité au collège (où ils iront tout de même). Et la pente est descendante, la situation se dégrade.
Globalement, il y a pire, mais au vu du niveau de dépenses, et quand on est un pays qui se targue d’être la 5 ou 6ème puissance mondiale, il faut être franc : c’est plus que décevant, et je suis suffisamment grossier ici, je me retiens, pour cette fois…
Grand Filtrage ?
Dans les faits, cette situation est différente des autres, où l’on diminue les budgets (notamment dans la santé), ici au contraire le budget explose et les résultats ne sont pas à la hauteur. Il faut avouer que l’éducation n’est pas un sujet simple ou linéaire, contrairement aux idées reçues, l’argent n’achète pas l’intelligence. Nos sociétés tendent à sous-estimer la part innée dans l’intelligence sur l’autel de l’égalité et de la page blanche. Mais cela ne signifie pas que l’éducation doit être abandonnée pour autant. Dans les faits, le contribuable est assommé d’impôts, pour financer ce qui ici est une gabegie. C’est une situation plus proche de l’écologie punitive, payer plus pour recevoir moins.
La plupart des gens, notamment en classe moyenne et laborieuse, ne peut pas envoyer ses enfants dans les établissements privés et prestigieux (ni habiter dans les endroits qui permettent d’aller dans les lycées publiques prestigieux). Leurs enfants reçoivent une éducation en dessous de leurs capacités, et doivent se mélanger à des enfants turbulents et en éternel retard (quand ils ne sont pas au collège avec des délinquants dangereux). Pendant ce temps, ceux qui ont les moyens payent pour une éducation prestigieuse (ou quand ils font des enfants stupides, payent un diplôme dans des établissements qui vendent des diplômes sans réel concours). L’égalité est rompue.
Inéducation
Les programmes vont à la baisse. Tout le monde en fait honnêtement le constat, et même les profs, pourtant bien rouges, le déplorent souvent aussi. Le constat ne nécessite pas d’étude poussée, il suffit de voir que certaines opérations mathématiques sont enseignées de plus en plus tard par exemple, ou de surveiller le contenu des manuels de ses enfants, de jauger leur niveau en lecture et écriture… Les causes de l’affaiblissement sont multiples et complexes : désinvestissement des parents, programmes affaiblis et idéologisés, enseignants qui manquent de formation ou de pédagogie, système trop rigide et inadapté aux besoins de l’enfant, idéologisation de l’éducation (combien d’heure ai-je passé à (ne pas) écouter des profs nous expliquer que le racisme c’est mal et qu’il faut sauver les ours polaires ?), immigration et dysgénisme, écrans et perturbateurs endocriniens…
La politique actuelle pousse cependant à éviter les redoublements, à éviter les échecs aux examens (augmentation du nombre de bacheliers, ce qui permet de faire croire que tout va bien), et même à pousser tout le monde dans les études supérieures, sauf quand il y a un bug sur les plateformes informatiques… Il faut rappeler qu’un étudiant qui étudie, c’est un individu qui n’est pas sur le marché du travail, et donc qui ne pointe pas chez Pôle Emploi, même s’il peut coûter cher.
Où va le pognon ?
Il n’y a pas plus légitime, quand on est un contribuable, que de demander le fruit de son impôt, et d’en contrôler l’usage. Enfin ça, c’est dans une démocratie en bonne santé, pas dans une ploutocratie sclérosée. Pourquoi dépense-t-on autant si les résultats ne sont pas là ? D’abord, le rapport de la cours des comptes montre bien qu’il y a un problème de sclérose, la gestion est beaucoup trop centralisée, l’organisation ne suit pas (de nombreuses heures ne sont pas effectuées alors que les ressources sont là, simplement par mauvaise allocation de ces ressources). Il faut décentraliser et libéraliser la gestion (Charles Gave, malgré ses défauts, a raison de rappeler régulièrement l’exemple de la Suède pour l’éducation). Il faut aussi revenir sur le Péché Originel du Collège Unique et renoncer au mythe de la page blanche, les élèves ont une part d’intelligence innée et l’éducation doit s’y adapter avec souplesse et non continuer dogmatiquement de penser que l’éducation fait l’intelligence.
Je soupçonne également que ce secteur, comme beaucoup d’autres, notamment la santé, souffre d’une inflation administrative : pour parler crument, le pognon va dans la poche de fonctionnaires administratifs qui ne servent qu’à gratter du papier, remplir de satanés cerfas, empêcher les gens sur le terrain de faire leur travail… Mécanisme décrit par John Michael Greer (entre autres), où l’inflation des diplômes entraine la création d’une caste managériale, qui s’accapare ressources et capital au détriment des autres. Les sous, au lieu d’aller dans le matériel ou dans l’embauche de professeurs, vont dans les poches d’administrateurs, de managers (ou s’ils sont absents, des heures d’administration incombent aux professeurs et les entravent). N’étant pas dans le milieu, j’attend confirmation ou infirmation de mes propos.
Filtrage et effondrement
Cependant, on peut aussi réfléchir aux conséquences : l’inégalité scolaire va provoquer une baisse de niveau des diplômés, ce qui est un problème pour une économie qui, selon les partisans du progrès technique, doit aller de plus en plus vers la complexité et l’expertise. Il y aura aussi une forme de Filtrage, où certains élèves talentueux ne pourront pas exploiter leur potentiel car mal orientés par exemple, là où des élèves médiocres mais bien aidés par leurs parents auront moins de souci à se faire. En somme, cet affaiblissement scolaire va peser sur l’économie, sur l’innovation déjà en berne. Sachant que, pour rattaquer les apôtres du progrès technique contre la collapsologie, on attend toujours la méga-innovation qui nous permettra de trouver une alternative aux énergies fossiles…